Rose-Anne VermerschMa chère Liliane
La série de broderies exposées en cette fin d'année, donne à lire et à voir des dialogues extraits de l'affaire Liliane Bettencourt. Traduits dans l'univers de Rose-Anne, ils sont kitsch et décalés à souhait. Histoire de forcer le trait.
C'est en regardant les 3 épisodes de la série Netflix L'Affaire Bettencourt : Scandale chez la femme la plus riche du monde que Rose-Anne décide de graver/broder dans le textile ces phrases saisissantes.
Dans la série, le scandale financier qui secoue l'héritière de L'Oréal et son entourage est mis en lumière de façon impitoyable. Ce qui frappe, ce sont les paroles qui échappent, souvent à la faveur d’une conversation apparemment anodine, et qui en disent long sur les dynamiques de pouvoir et de manipulation. L'une des phrases les plus marquantes prononcée par un conseiller financier à propos de Liliane Bettencourt est : « Il ne faut pas qu'on se fasse prendre ». Cette simple réplique, portée sur un ton presque machinal, est d'une puissance terrifiante. Elle n'évoque pas seulement le risque d’un scandale financier, mais un mode de pensée où la moralité est éclipsée par la peur de la sanction. Une logique de dissimulation et de manipulation qui s’immisce insidieusement dans le quotidien de ceux qui sont en charge de fortunes colossales et de vies fragiles.
L’utilisation du langage est ici essentielle. Les mots prononcés, souvent froids et déshumanisés, dépeignent une réalité où la richesse et le pouvoir n’excusent en rien l’indifférence aux souffrances humaines. Ces échanges, loin d’être seulement des manœuvres pour sauver une fortune, traduisent une vision du monde où l’humain est relégué au second plan. Les phrases qui frappent le plus ne sont pas celles qui parlent du scandale financier en soi, mais celles qui révèlent une profonde déconnexion morale. « Ne pas se faire prendre » : une expression qui résume, à elle seule, le cynisme d’un système où l’humanité se perd dans l’avidité et l’intérêt personnel. Alors ces phrases, Rose-Anne, elle les répète.
Rose-Anne, avec ses fils, brode et écrit une chronique de manipulation, d’abus de pouvoir et de honte. Qu’ils se déroulent dans des milieux ultra-privés ou dans des contextes plus quotidiens, les mécanismes restent les mêmes, qu’il s’agisse de ceux qui ont tout et de ceux qui cherchent à en profiter. Les mots et les gestes des personnages révèlent la vacuité d’un système où l’humain est souvent sacrifié pour préserver un semblant de contrôle.
02.12.24 - 01.02.25
Rose-Anne Vermersch
Les oeuvres de Rose-Anne Vermersch inaugurent le cycle des expositions qui viendront ponctuer et rythmer l'activité de la frange. c'est avec bonheur que le mur, jusqu'ici immaculé, de la frange se voit habillé de 19 broderies de Rose-Anne Vermersch, artiste qui vit et travaille à Genève. je vous souhaite d'éprouver le même plaisir que j'ai eu à la découverte de ce travail singulier, méticuleux, éclatant, où le second degré occupe une large place.
20.03.23 - 14.07.23